REPUBLIQUE DU CAMEROUNPaix – Travail – Patrie *************** COUR SUPREME DU CAMEROUN-------------------- CHAMBRE ADMINISTRATIVE -------------------- SECTION DU CONTENTIEUX DE L’ANNULATION ET DES QUESTIONS DIVERSES --------------------- DOSSIER N°061/P/RG/QD/2019 Du 09 Décembre 2019 Pourvoi n°177/2019 du 04/12/2019 ARRET N°196/QD/2022 du 12/10/2022 ------------- AFFAIRE : Procureur Général près le Tribunal Administratif du Centre C/ Etat du Cameroun (MINSANTE), NOMO Romaric Eugène --------------- COMPOSITION :
Charles ONDOUA OBOUNOU……...Conseiller à la Chambre Administrative ; Joseph Marie NKE …….………..Conseiller à la Chambre Administrative ; ……………………………………..……..MEMBRES Henry EBOA……..…………….….Avocat Général ; Me Amélie ELEMVA MVE………….……. Greffier ; RESULTAT : (Voir Dispositif ………………………………………………………………………...
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AU NOM DU PEUPLE CAMEROUNAIS ************ ---- L’an deux mille vingt deux ; ----Et le 12 du mois d’Octobre ; ----La Chambre Administrative de la Cour Suprême siégeant en Section du Contentieux de l’Annulation et des Questions Diverses au Palais de Justice à Yaoundé, dans la salle des audiences de ladite Cour composée de : ----MM. Emmanuel SANDEU, Président de la Section….Président ; ----Charles ONDOUA OBOUNOU, Conseiller à la Chambre Administrative ; ----Joseph Marie NKE, Conseiller à la Chambre Administrative ; ……………………………………..MEMBRES ; ----En présence de M. Henry EBOA, Avocat Général à la Cour Suprême, occupant le banc du Ministère Public ; ----Avec l’assistance de Maître Amélie ELEMVA MVE, Greffier ; ----A rendu en audience publique ordinaire conformément à la loi, l’arrêt dont la teneur suit : ENTRE ----Le Procureur Général près le Tribunal Administratif du Centre, demandeur ; D’UNE PART ET ----L’Etat du Cameroun (MINSANTE), ayant pour Conseil Maître NDOUMOU Paul, Avocat, BP : 16292 Tél : 699.90.82.02 Yaoundé, défendeur ; ----NOMO Romaric Eugène, ayant pour Mandataire M. ABA’A OYONO Jean Calvin, Tél : 697.02.52.43 Yaoundé, défendeur ; D’AUTRE PART LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE ----Statuant sur le pourvoi formé le 04 Décembre 2019 au greffe du Tribunal Administratif du Centre à Yaoundé, par Monsieur ZENGUE Luc Yannick, Attaché au Parquet Général près ledit Tribunal, agissant au nom et pour le compte du Ministère Public, contre le jugement n°127/ADD/2019/TA-YDE rendu le 23 Avril 2019 par le susdit Tribunal dans l'affaire opposant NOMO Romaric Eugène à l'Etat du Cameroun (Ministère de la Santé Publique) ; ----Vu la loi n°2006/016 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême, modifiée et complétée par celle n°2017/014 du 12 Juillet 2017 ; ----Vu la loi n°2006/022 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des Tribunaux Administratifs ; ----Vu les Décrets n°s 2006/465 du 20 Décembre 2006, 2010/218 du 08 juillet 2010, 2014/574 du 18 décembre 2014, 2017/277 du 07 Juin 2017 et 2020/434 du 10 Août 2020 portant nomination de Magistrats au siège de la Cour Suprême ; ----Vu l’ordonnance n°438 du 23 Septembre 2020 de Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême portant répartition des Conseillers dans les Chambres Judiciaire Administrative et des Comptes de la Cour Suprême ; ---- Vu l’ordonnance n°454 du 06 Octobre 2020 de Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême portant désignation des Présidents de Section à la Cour Suprême ; ----Vu l’ordonnance n°0433/CAB/PCA/CS du 15 Octobre 2020 de Monsieur le Président de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, portant répartition des Conseillers dans les Sections de ladite Chambre ; ----Vu les mémoires déposés au Greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême ; ----Vu les conclusions en date du 11 Août 2022 de Monsieur Luc NDJODO, Procureur Général près la Cour Suprême ; ---- Après avoir entendu en la lecture du rapport, Monsieur Charles ONDOUA OBOUNOU, Conseiller à la Chambre Administrative, substituant le Président SANDEU, Emmanuel rapporteur ; ----Nul pour le Procureur Général près le Tribunal Administratif du Centre, non représenté à l’audience bien que régulièrement convoqué suivant lettre N°001207/L/G/CS/CAY délivrée le 21 Septembre 2022 ; ----Nul pour l’Etat du Cameroun (MINSANTE), non représenté à l’audience bien que régulièrement convoqué suivant lettre N°001208/L/G/CS/CAY délivrée le 21 Septembre 2022 ; ----Ouï NOMO Romaric Eugène, représenté à l’audience par son Mandataire, en ses observations orales ; ----Après en avoir délibéré conformément à la loi ; ---- Attendu que par déclaration faite le 04 Décembre 2019 au greffe du Tribunal Administratif du Centre à Yaoundé, Monsieur ZENGUE Luc Yannick, Attaché au Parquet Général près ledit Tribunal, agissant au nom et pour le compte du Ministère Public, s’est pourvu en cassation contre le jugement n°127/ADD/2019/TA-YDE rendu le 23 Avril 2019 par le susdit Tribunal dans l'affaire opposant NOMO Romaric Eugène à l'Etat du Cameroun (Ministère de la Santé Publique) ; ----Attendu que ledit jugement est ainsi conçu en son dispositif : « Par ces motifs Statuant publiquement, Contradictoirement, en matière d’annulation et questions diverses, à l’unanimité des membres du collège, en premier et dernier ressort ; DECIDE Avant-Dire-Droit Article 1er : Le Tribunal Administratif est compétent ; Article 2 : Les dépens sont réservés. » ----Attendu que le 09 Décembre 2019, le Procureur Général près le Tribunal Administratif du Centre a déposé le mémoire au soutien de son pourvoi, au greffe de la Chambre Administrative sous le n°1954, présenté comme suit : « Plaise à la Chambre Administrative de la Cour Suprême; « I FAITS ET PROCEDURE « Par requête enregistrée le 12 octobre 2017, monsieur Jean Calvin ABA'A OYONO, mandataire agissant au nom et pour le compte de monsieur NOMO Romaric, a saisi le tribunal administratif de Yaoundé, aux de condamnation de l'Etat au paiement de la somme de CFA deux milliards (2000000 000) francs en réparation du dommage corrélatif à l'intervention chirurgicale qu'il a subi ; « Le recourant fait valoir que courant mois de novembre 2015, le Docteur MPELE Patrice, Médecin en service à l’Hôpital de district de Biyem-Assi qui lui a diagnostiqué une hernie bilatérale, a diligenté l'intervention chirurgicale visant une cure de ladite de cette hernie ; « Il poursuit en déclarant que postérieurement à cet acte de soin, il a constaté, à la suite du retrait de la sonde, des écoulements de sang en provenance de l'urètre et des douleurs, d'abord au niveau du bas- ventre, puis au niveau du testicule droit ; « Il explique que le 13 avril 2016, une échographie des bourses a révélé une atrophie irréversible dudit testicule, tandis que l'uretrocystoscopie a montré un rétrécissement annulaire de l’urètre, bulbaire causé par la pose répétée de la sonde urinaire ; « Le demandeur souligne que la contre-expertise conduite par l'Hôpital Central de Yaoundé confirme les conclusions ci-dessus et, notamment, la perte définitive de sa virilité ; « Le Ministère de la Santé Publique soulève l'exception d'irrecevabilité du recours contentieux de NOMO Romaric, pour forclusion du recours gracieux ; « Le défendeur soutient que c'est le 18 juin 2016 que le médecin traitant a confié à ce patient, qui se plaignait d'une vive douleur du testicule, qu'il suspectait une torsion du testicule ; « Il ajoute que le recourant qui disposait dès lors de six (06), mois pour formuler sa réclamation gracieuse, a saisi le ministre de la Sante le 16 mai 2017, au-delà du délai susvisé ; « Il conclut au fond qu'aucun lien de causalité n'existe entre le dommage dont se prévaut le recourant et l'action de son médecin, puisqu’il est avéré que la torsion activité sexuelle prématurée ; « Le Ministère public, en s'appuyant sur les dispositions des articles 2 et 3 alinéa (1) de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs, a conclu à l'incompétence matérielle de la juridiction saisie. « Statuant par jugement avant-dire-droit susvisé, la juridiction Administrative de céans, a retenu sa compétence; « Cette décision qui m'a été notifiée le 25 novembre 2019 au sens de l’article 35 alinéa 1 (e) de la loi n°2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême, encourt cassation pour violation des dispositions des articles 2 et 3 de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs ; « II. DISCUSSION « 1. SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI « Attendu qu'aux termes de l'article 51 de la loi organique des tribunaux administratifs, « (1) Le tribunal administratif doit statuer immédiatement par décision avant-dire-droit distincte, sur les exceptions d'incompétence fondées sur l'article 2 ci-dessus, sans pouvoir en aucun cas joindre l'incident au fond. (2) Il peut d'office, relever une incompétence dans les mêmes formes. (3) Les décisions rendues en application des alinéas 1 et 2 du présent article peuvent, dans un délai de dix (10) jours à compter de leur notification faire l'objet de la part de toutes les parties, y compris le Ministère public, d'un pourvoi devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême. (4) Ce pourvoi est valablement formé par déclaration au greffe de la juridiction dont émane la décision entreprise (…) » : « Attendu par ailleurs que l'article 91 alinéa (1) de la loi fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême précitée prévoit que « dans les trente (30) jours de la réception de l'acte de pourvoi, le demandeur dépose, contre récépissé, un mémoire au greffe de la Chambre Administrative »: « Attendu en l'espèce que le jugement n° 127/ADD/2019/TA-YDE du 23 avril 2019 a été notifié le 25 novembre 2019 au Ministère public qui par déclaration verbale au greffe du tribunal administratif de Yaoundé du 04 décembre 2019 a formé pourvoi contre cette décision ; « Que le mémoire soutenant ce pourvoi a été déposé le 09 décembre 2019 ; « Qu'en conséquence, les pourvoi et mémoire du Ministère public sont recevables, comme faits dans les délai et forme légaux ; « 2. SUR LE BIEN FONDE DU POURVOI « Attendu que le Ministère public invoque le moyen unique pris de la violation des dispositions des articles 2 et 3 alinéa (1) de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs. « Qu'aux termes de l'article 2 de loi susvisée, « (1) Les tribunaux administratifs sont des juridictions inférieures en matière de contentieux administratif au sens de l'article 40 de la Constitution. (2) Les Tribunaux Administratifs connaissent en premier ressort, du contentieux des élections régionales et municipales et en dernier ressort, de l'ensemble du contentieux administratif concernant l'Etat, les collectivités publiques territoriales décentralisées et les établissements publics administratifs, sous réserve des dispositions de l'article 14 (2) de la présente loi. (3) Le contentieux administratif comprend :
- le vice de forme ; - l'incompétence ; - la violation d'une disposition légale ou réglementaire ; - le détournement de pouvoir.
Que l'article 3 alinéa (1) du même texte dispose que : « les tribunaux de droit commun connaissent, conformément au droit privé, de toute autre action ou litige, même s'il met en cause les personnes morales énumérées à l'article 2, la responsabilité desdites personnes morales étant à l'égard des tiers, substituée de plein droit à celle de leurs agents auteurs des dommages causés dans l'exercice même de leurs fonctions. » ; « Attendu en l'espèce, qu'il est constant que la saisine du tribunal administratif est relative à un différend mettant en cause le Ministère de la Santé Publique, dont la responsabilité est à l'égard des tiers, substituée de plein droit à celle du Docteur MPELE Patrice, Médecin en service à l'hôpital de district de Biyem-Assi, auteur du dommage causé dans l'exercice de ses fonctions à monsieur NOMO Romaric Eugène ; « Que ce litige correspond à l'hypothèse d'une action qui, au sens des dispositions légales susmentionnées) relève de la compétence des tribunaux de droit commun statuant conformément au droit privé et non de celle des tribunaux administratifs ; « Attendu de plus que pour retenir sa compétence, le tribunal administratif de Yaoundé a estimé que si les dispositions de l'article 3 ci-dessus énoncées « visent de manière générale les fautes personnelles commises par les agents de l'Etat dans l'exercice de leurs fonctions, elles n'excluent, pas pour autant du champ de compétence du juge administratif les recours contre les actes médicaux commis dans un établissement public de santé donc les règles d'organisation et de fonctionnement sont principalement régies par le droit administratif» ; « Qu'il s'agit d'une interprétation erronée de la loi ; « Qu'en effet, l'analyse attentive des dispositions des articles 2 et 3 de la loi organique des tribunaux administratifs met en exergue une répartition de compétences en matière de responsabilité administrative à laquelle n'échappe pas l'aspect spécifique de la responsabilité médicale ; « Qu'ainsi, l'acte de diagnostic ou de soin, en cas d'erreur fautive relève de la responsabilité délictuelle du médecin, sur le fondement des articles 227 et 228 alinéa 2 (c) du code pénal ou des articles 1382 et suivants du code civil, l'Etat pouvant être appelé en garantie, tandis que seule la faute de service matérialisée par les dysfonctionnements de l' établissement public de santé met en jeu la responsabilité pécuniaire de l'Etat directement devant la juridiction, administrative ; « Qu'en se déclarant compétent, comme elle l'a fait, la juridiction administrative de céans a méconnu les dispositions légales applicables ; « Que dès lors1 la décision fondée sur ce raisonnement qui contrevient a la loi, encourt cassation, par application de l'article 35 alinéa 1 (e) de la loi n02006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême ; « Statuant à nouveau « Attendu qu'aux termes de l'article 104 alinéa (4) de la loi n° 2006/016 susvisée, « en cas de cassation, la Chambre Administrative dispose d'un pouvoir d'évocation lorsque l'affaire est en état d'être jugée au fond » ; « Qu'en adjugeant au Ministère public le bénéfice de son argumentation qui précède, il y a lieu de se déclarer matériellement incompétent, et de renvoyer le recourant à se pourvoir ainsi qu'il avisera ; « PAR CES MOTIFS « Concluons qu'il plaise à la Chambre Administrative de la Cour Suprême, par les moyens qui précèdent et tous autres que la Haute juridiction pourrait aviser d'y suppléer, de bien vouloir : « En la forme, recevoir le pourvoi et le mémoire du Ministère public ; « Au fond, casser le jugement n° 227/ADD/2019/TA-YDE du 23 avril 2019 rendu par le tribunal administratif de Yaoundé ; « Statuant à nouveau, déclarer le juge administratif matériellement incompétent. / ----Attendu que ce mémoire a été notifié, sans suite, au Ministre de la Santé Publique suivant lettre n°174/L/G/CS/CAY en date du 17 Mars 2020 du Greffier en Chef de la Chambre Administrative, reçue le 02 Avril suivant dans les services de ladite autorité. ----Attendu qu’en revanche le sieur NOMO Romaric Eugène, sous la plume de son mandataire ABA’A OYONO Jean Calvin, a réagi par son mémoire en défense dit « Mémoire en réponse » déposé au Greffe de la Chambre le 10 Juin 2021 sous le n°761, dont la teneur suit : «Monsieur, « J'accuse réception du mémoire ampliatif élaboré par le Procureur Général près de la cour d'Appel du Centre aux fins de pourvoi formé contre le jugement du Tribunal Administratif querellé sus désigné en objet. Y faisant suite, j'ai l'honneur de vous faire tenir le raisonnement juridique conséquent ci- après qui sied en pareille circonstance. « S'il faut admettre que le Procureur Général fait montre d'une méconnaissance criante des bases du droit du contentieux administratif, il faut lui administrer la leçon ci-après : « En droit administratif général, il faut clairement distinguer la faute personnelle de l'agent de la faute de service qui incombe à l'ensemble du service y compris son patrimoine. « En l'espèce, on ne se situe pas dans ce cadre contentieux dans l'hypothèse d'une faute personnelle qui aurait été commise par le médecin de santé publique mis en cause en situation d'exercice de sa fonction et, ce faisant, lui serait imputable. On est plutôt ici dans l'hypothèse d'une faute de service qui engage, non pas l'agent, mais le service public hospitalier, en l'occurrence l'hôpital de Biyem-Assi. « En conclusion, il s'agit d'un acte mettant en jeu la responsabilité de l'établissement public hospitalier querellé, toute chose qui relève de la compétence du juge administratif. « Au regard de ce qui précède, qu'il plaise à la haute juridiction administrative de rejeter en totalité les arguments développés par le Ministère Public puis, en conséquence, dire comme fondé le jugement du tribunal Administratif régional du centre, en l'occurrence celui n°227/ADD/2019/TA- Yaoundé du 23 avril 2019 déclarant la compétence du juge administratif à connaître du contentieux en cause. « Et ce sera justice Profonds respects. » ----Attendu que l’Etat du Cameroun (Ministère de la Santé Publique) a déposé le 13 Juillet 2021 au susdit Greffe, des observations sur le mémoire en réponse de NOMO Romaric Eugène, dans les termes ci-après : « PLAISE A l'AUGUSTE CHAMBRE « Vu le jugement n° 127/ADD/2019/TA-YDE du 23 Avril 2019 ; « Vu le pourvoi formé contre ledit jugement ; « Vu Je mémoire de sieur NOMO Romane produit par son mandataire en date du 07 juin 2020 ; « Attendu qu'à travers ledit mémoire, le mandataire de sieur NOMO Romaric entend comme à l'accoutumée administrer au procureur général près la cour d'appel du centre la leçon sur les bases du droit du contentieux administratif ; « Que pour ce faire, il prétend qu'en droit administratif général, il faut clairement distinguer la faute personnelle de l'agent de la faute de service qui incombe à l'ensemble du service y compris son patrimoine ; « Qu'en l'espèce, on ne se situe pas dans ce cadre contentieux dans l'hypothèse d'une faute personnelle qui aurait été commise par le médecin de santé publique mis en cause en situation d'exercice de sa fonction et, en ce faisant, lui serait imputable. On est plutôt ici dans l'hypothèse d'une faute de service qui engage, non pas l'agent, mais le service public hospitalier, en l'occurrence l'hôpital de Biyem-assi ; « Qu'or, il oublie que le service public ou l'administration est une entité abstraite et que sa responsabilité ne peut être engagée que si un de ses agents est mis en cause ; « Que dans le cas d'espèce, c'est à bon droit que le procureur général a distingué la faute personnelle et la faute de service ; « Attendu que s'il est constant que les personnes victimes d'une erreur ou d'une faute médicale ou leurs proches peuvent être indemnisés sur certaines conditions, car toute erreur ou toute faute médicale engage pas nécessairement la responsabilité du professionnel de santé qui est le médecin : « Qu'ainsi, pour Que sa responsabilité soit engagée il faut au préalable déterminer si l'erreur du médecin constitue ou non une faute médicale susceptible d'engager soit sa responsabilité personnelle ou celle de service ; « Que dans le cas d'espèce, aucune recherche n'a été effectuée dans ce sens pour déterminer si oui ou non il y a eu erreur médicale et par voie de conséquence faute personnelle ou de service susceptible d'engager la responsabilité personnelle du médecin traitant ou celle de service ; « Qu'il y a dès lors lieu pour le tribunal administratif de se déclarer incompétent comme requis par le procureur général près la Cour d'Appel du Centre ; « PAR CES MOTIFS « Faire droit à la demande du Procureur Général près le parquet général de la Cour d'Appel du Centre ; SOUS TOUTES RESERVES » SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI ----Attendu que le pourvoi du Ministère Public est recevable pour avoir été fait conformément aux prescriptions des articles 51 la loi n°2006/022 du 29 Décembre 2006 relative aux Tribunaux Administratifs et 90 de la loi n°2006/016 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême ; AU FOND ----Attendu qu’il est fait grief au jugement attaqué d’avoir retenu la compétence du juge administratif dans cette affaire en méconnaissance des dispositions des articles 2 et 3 al 1 de la loi n° 2006/022 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des Tribunaux Administratifs, aucune faute de service, matérialisée par des disfonctionnements de l’établissement public de santé, de nature à mettre en jeu la responsabilité directe de l’Etat, n’ayant été relevée ; ----Attendu que le moyen unique de cassation ainsi soulevé et développé par le Ministère Public dans le mémoire de pourvoi reproduit ci-dessus n’est pas pertinent ; ----Attendu qu’en effet, les articles 2 et 3 al 1 de la loi n°2006/022 du 29 Décembre 2006 visés disposent : Article 2 : « (1) Les Tribunaux administratifs sont des juridictions inférieures en matière de contentieux administratif au sens de l’article 40 de la constitution. (2) Les Tribunaux Administratifs connaissent en premier ressort, du contentieux des élections régionales et municipales et en dernier ressort, de l’ensemble du contentieux administratif concernant l’Etat, les collectivités publiques territoriales décentralisées et les établissements publics administratifs, sous réserve des dispositions de l’article 14 (2) de la présente loi. (3) Le contentieux administratif comprend :
- le vice de forme ; - l’incompétence ; -la violation d’une disposition légale ou règlementaire ; - le détournement de pouvoir ;
Article 3 : « Les Tribunaux de droit commun connaissent, conformément au droit privé de toute autre action ou litige, même s’il met en cause les personnes morales énumérées à l’article 2, la responsabilité desdites personnes morales étant à l’égard des tiers, substituée de plein droit à celle de leurs agents auteurs des dommages causés dans l’exercice même de leurs fonctions » ; ----Attendu qu’il résulte de la lecture combinée de ces textes une répartition de compétence qui met en exergue le domaine du contentieux administratif et celui de la responsabilité civile des personnes morales de droit public pour les dommages causés par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions ; ----Attendu qu’en l’espèce, pour retenir la compétence du juge administratif, le jugement attaqué énonce : « Considérant que si les dispositions sus-énoncées visent de manière générale les fautes personnelles commises par les agents de l’Etat dans l’exercice de leurs fonctions, elles n’excluent pas pour autant du champ de compétence du juge administratif, les recours contre les actes médicaux commis dans un établissement public de santé dont les règles d’organisation et de fonctionnement sont principalement régies par le droit administratif ; Que la Chambre Administrative de la Cour Suprême l’a d’ailleurs rappelé en ces termes, s’agissant des préjudices causés par l’Administration du fait d’une négligence constatée dans un service hospitalier public : « Attendu que cette faute de négligence ainsi établie engage nécessairement la responsabilité de l’Administration (décision n°87 du 30 Juin 2004 Affaire BEYINA MESSAGA Jean Baptiste contre Etat du Cameroun (MINSANTE)» ; ----Attendu que ces énonciations sont pertinentes dès lors que les actes médicaux en cause ne sont pas détachables de l’activité du service public hospitalier qui a fourni tant le personnel que tous autres moyens utiles et nécessaires à l’accomplissement desdits actes ; ----Qu’il s’ensuit que le pourvoi du Ministère Public n’est pas justifié et qu’il y a lieu de le rejeter ; ----Attendu qu’il y a par conséquent lieu de retourner le dossier au Tribunal Administratif du Centre pour la suite de la procédure ; PAR CES MOTIFS ----Statuant publiquement, en Section du Contentieux de l’Annulation et des Questions Diverses, à l’unanimité des voix des membres de la Collégialité ; DECIDE : ----Article 1er : Le pourvoi est recevable en la forme ; ----Article 2 : Au fond, il n’est pas justifié ; il est par conséquent rejeté ; ----Article 3 : Le dossier est retourné au Tribunal Administratif du Centre pour la suite de la procédure ; ----Article 4 : Les dépens sont laissés à la charge du Trésor Public ; ----Article 5 : A la diligence du Greffier en Chef de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, la présente décision sera notifiée aux parties et publiée par les soins du Procureur Général près ladite Cour ; ----Ainsi jugé et prononcé par la Chambre Administrative de la Cour Suprême statuant en cassation, en son audience ordinaire du mercredi 12 Octobre 2022, en la salle des audiences de la Cour où siégeaient ; ----MM. Emmanuel SANDEU, Président de la Section.......................Président ; ----Charles ONDOUA OBOUNOU, Conseiller à la Chambre Administrative ; ----Joseph Marie NKE, Conseiller à la Chambre Administrative ; ………….………………………………..……………………………... Membres ; ----En présence de M. Henri EBOA, Avocat Général à la Cour Suprême, occupant le banc du Ministère Public ; ----Avec l’assistance de Maître Amélie ELEMVA MVE, Greffier ; ----En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président, les Membres et le Greffier ; ----En approuvant ______ mot (s) ______ ligne (s) _____ rayé (s) nul (s) ainsi que________ renvoi (s) en marge. /-
LE PRESIDENT LES MEMBRES LE GREFFIER M. Emmanuel SANDEU M. Charles ONDOUA OBOUNOU Me. Amélie ELEMVA MVE
M. Joseph Marie NKE
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